• publié le 28 avril 2017
La place des parents dans nos associations

Intervention de Christine Meyrignac au cours de l’Assemblée Générale de la Facel du 25 avril 2017.
Christine Meyrignac est  déléguée vicariale au Vicariat Enfance Adolescence, ancien chef d’établissement dans une école où existe un accueil de loisirs.

Vous trouverez ci-dessous un condensé de l’intervention de Christine Meyrignac.

Introduction

Ce soir, nous allons aborder un sujet qui, sans représenter la première préoccupation des présidents d’associations, n’en demeure pas moins une question  centrale pour nos associations : « Comment entrer en contact avec les parents des enfants que nous accueillons et quelle place leur donner ? ».  Je la complèterai par deux autres « de quoi  les parents des enfants que nous accueillons ont-ils besoin ? »  et « pourquoi sont-ils si difficilement accessibles ? ». En effet,  les familles qui nous confient leurs enfants ont un besoin à satisfaire,  exprimé ou sous-jacent, et il est assez rare qu’elles soient conscientes d’avoir une place à tenir dans l’association.

  1. Les parents ont un besoin de compétence à double titre

Construction d’un enfant « compétent »
Beaucoup de parents qui expriment leurs aspirations pour leur enfant, désirent d’abord qu’il( ou elle) devienne savant,  compétent, tout en étant équilibré. La recherche de l’équilibre est très importante. Cette aspiration à construire un adulte qui puisse tenir sa place, et la garder, dans la société existe depuis toujours,  mais lorsque les soutiens familiaux traditionnels se raréfient, elle doit être confiée à des professionnels rémunérés.

Défaillance de l’adulte éducateur
De plus, cette première aspiration à équiper son enfant des meilleures compétences est doublée chez certains d’un sentiment de défaillance de leur propre compétence d’éducateur. Un père me disait un jour : « Je ne me sens pas légitime pour imposer quelque chose à mon enfant ! ». Certains parents n’ont pas confiance dans leurs propres capacités à faire face. Cela peut paraître paradoxal : ils veulent donner confiance en eux à leurs enfants, et se désolent des contradictions qu’ils doivent eux-mêmes subir, pour y parvenir. En outre, ils n’ont pas toujours l’énergie de faire face à ces tiraillements qui jalonnent la croissance de chaque personne.  Avec ou sans bonne volonté, la résistance aux enfants est difficile et ils apprécient de s’en remettre à des « professionnels ».

Ce besoin à double face les amène à rechercher des activités qui vont faire croitre les compétences de leurs enfants, où ces derniers vont épanouir leurs personnalités sous le regard d’éducateurs bienveillants et rigoureux, sans avoir à y consacrer eux-mêmes ni  temps ni énergie.

Dans ce contexte il apparaît essentiel  de faire du moment de l’inscription un temps « clé », un moment qui doit être l’occasion de discuter longuement et en vérité avec les parents de leurs attentes, de leur façon de voir leur enfant. Le dialogue n’est pas intrusif s’il est ouvert et mené comme une nécessité de connaissance réciproque.

  1. Les parents ont besoin de notre soutien

Dire le bien
Devant la perspective d’avenir pour leurs enfants, certains parents se sentent souvent démunis et certaines situations le justifient: parents seuls, situation sociale ou financière compliquée, divorce, etc…..  d’autres moins, la fragilité reste présente.  Nous sommes attendus pour nos conseils, nous avons à apporter « la technique de l’éducateur », le savoir-faire. Le réconfort est essentiel.

Cela passe d’abord par « dire la réussite ». Une parole positive fait grandir, mais elle doit être vraie, si possible objective. Les éducateurs sont formés à l’encouragement des enfants, pas toujours avec les parents qui entendent trop souvent des remarques négatives. On peut remplacer le systématique : « Il a été gentil aujourd’hui !  »,  « c’est mieux !» par « Il a réussi à prêter son ballon », «  Elle a accepté de perdre au babyfoot ! »

Cette remarque positive doit être objective et réelle.  Elle demande une vraie observation des enfants dans leurs activités. On ne peut pas dire n’importe quoi.

Apaiser
Les parents font beaucoup l’expérience  du rapport de force dans leur milieu professionnel et certains sont parfois enclins à employer ce comportement que nous ressentons vite comme de l’intimidation. «  Quoi ! mon fils n’a pas eu de goûter , vous êtes incapables de contrôler ce que chacun a reçu ! Je paie ! »  On est pris au dépourvu par de telles mises en accusation, il faut percevoir l’angoisse de la dépossession sous-jacente, les prendre au sérieux comme telles et puis détricoter l’histoire ensuite pour comprendre la réalité!

  1. Les parents peuvent être disponibles

A priori si les familles nous confient leurs enfants, c’est qu’elles ne sont pas disponibles, donc inutile d’avoir pour objectif de les mobiliser chaque semaine. Mais dans le précieux rendez-vous d’inscription, on peut demander une participation annuelle selon les goûts ou les savoir-faire : outre les accompagnements, un gâteau une fois dans l’année,  l’animation d’un atelier une fois,  proposer  une sortie, venir partager le livre qu’ils ont aimé enfant, leur premier film ou une exposition.

Quand ils se seront libérés pour une demi-journée dans leur travail, ils peuvent avoir envie de renouveler l’expérience. Mais  il faut être patient, et très organisé, établir un planning longtemps à l’avance, le mettre à jour souvent et rappeler le parent concerné les deux semaines avant, pour pouvoir changer son fusil d’épaule en cas de défaillance

    4.

C’est un constat que je fais depuis de nombreuses années: l’autorité est de moins en moins admise: on doute du père, de celui qui sait, de celui qui décide, et on est prompt à la contestation. On l’entend dans tous les lieux qui accueillent des enfants (école, catéchisme, centres de loisirs) : s’ils sont beaucoup plus libres dans leur parole que les enfants des générations précédentes, ils sont moins respectueux de la hiérarchie, ont perdu  le sens du sacré. C’est qu’ils grandissent dans ce monde du doute généralisé où la foi chrétienne est réduite par beaucoup de nos contemporains à la conservation de rites vieillots, à une crédulité enfantine, au besoin d’appartenance à un groupe. On le voit bien, les parents nous choisissent pour les « valeurs » qui résultent de la foi chrétienne, mais dans leur majorité, ils n’y adhèrent pas au fond. Cela les place dans une contradiction constante !

Or nous le savons bien,  notre foi n’est pas une certitude immuable, elle nous vient de la Personne de Dieu libre qui nous a créé à son image hommes libres. Elle est un dialogue toujours en évolution. Cela signifie, pour ce qui nous concerne ce soir, qu’il nous faut regarder chaque parent et chaque enfant comme une personne libre et capable de grandir et changer, mais aussi capable de choisir de nous mentir, de dissimuler. Comme nous avons cette liberté dans le regard de Dieu.